Il ne s’agit pas juste ici de traduire en mots et en images des émotions que nous inspire la fréquentation des espaces forestiers. Ni de traverser la forêt, de la regarder, de la sentir, puis de rendre compte.
Nous avons plutôt tenté de nous laisser happer par la forêt, de la laisser venir en nous, regard flottant, pensées absentes, oubliant jusqu’à qui nous sommes, avec juste cette grande attention aux vibrations qui nous envahissent quand on pénètre sous les arbres.
Nous avons tenté de devenir nous-mêmes forêt, par immersion, par lente imprégnation, par fréquentation régulière.
Puis de laisser « advenir » cette forêt, une forêt, des forêts, à travers nos créations. Sans retenir quoi que ce soit d’autre que ce souffle qui nous a traversés et rendus, pour un moment, parcelles d’une éternité verte.
C’est sans doute le mieux que nous puissions faire, avant de nous-mêmes nous transformer en arbres ou en lianes, un jour… Car que pouvons-nous percevoir de cette altérité fondamentale depuis notre condition d’humain ?

Geneviève Michon est ethnobotaniste, écrivaine, direc-trice de recherche à l’IRD et photographe d’art.
Philippe Deltour est artiste plasticien confirmé avec près d’une centaine d’expositions un peu partout dans le monde.
Ils se sont rencontrés autour des genévriers thurifères dans l’Atlas marocain, puis autour des arbres et des forêts libres du Sud de la France. Leur travail commun a donné lieu à quatre expositions d’envergure (Pézenas 2018, Marrakech, 2018, Agde 2019, Essaouira, 2019).
Comme par magie, les photographies de l’une répondent aux peintures de l’autre. Leurs textes se mêlent et traduisent l’âme de ces arbres, isolés ou en société forestière qui, désormais, habitent leur vie.